La pensée girardienne forme un ensemble très cohérent, que je me propose de schématiser ici, en précisant que chacun des trois niveaux peut être pris ou considéré isolément.
- Le désir est mimétique : on ne désire pas tant un objet pour sa valeur intrinsèque, ou parce qu’on l’aurait choisi indépendamment, que parce qu’un autre le désire. Cet autre est nommé par Girard le médiateur (il peut être externe ou interne). [Détails en notes]
- Pour éviter que la prolifération des rivalités mimétiques (issues de désirs se portant, donc, sur de mêmes objets) ne fissure leurs communautés, les groupes humains ont tendance à faire des boucs émissaires. Le bouc émissaire, innocent des maux dont on s’acharnera à le charger, réunira bien involontairement contre lui une « unanimité violente » et son exclusion ramènera un semblant de cohésion.
- Cette tendance est révélée (et démonétisée) par le récit judéo-chrétien, notamment celui de la Passion du Christ, qui place le lecteur non plus du côté de la majorité violente (et des mensonges qu’elle aime se raconter) mais du côté de la victime, dont l’innocence est absolument évidente. Au-delà de ce point symbolique de l’Histoire, par un long éveil des consciences individuelles, toute nouvelle fabrication collective de boucs émissaires apparaîtra de plus en plus pour ce qu’elle est vraiment : une mascarade cruelle, injuste et inefficace.
Même si, comme je l’ai dit, chaque étage fonctionne de manière autonome, les trois niveaux se tiennent et s’enchaînent dans une déroutante unité.
Pour découvrir le premier étage, vous pouvez lire (l’extraordinaire) Mensonge romantique et vérité romanesque, paru en 1961.
Pour le deuxième étage : Le bouc émissaire
Et pour le troisième : Des choses cachées de puis la fondation du monde.
mardi 28 décembre 2021
Notes
1. Un médiateur est externe quand…